LFSS 2020 – Un levier de 2,2 milliards d’euros au service de l’épargne salariale
Fin 2018, le Gouvernement était intervenu au cœur de la crise des gilets jaunes pour proposer plusieurs mesures d’urgence économiques, au nombre desquelles figurait une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, rapidement baptisée « prime Macron » par les observateurs.
L’enjeu était alors de soutenir le pouvoir d’achat des ménages, en permettant aux employeurs de verser à leurs salariés, sous condition de rémunération, une prime exonérée d’impôt sur le revenu, de cotisations sociales patronales et salariales et de prélèvements sociaux dans la limite de 1.000 €.
Selon le bilan communiqué par l’ACOSS le 3 mai 2019, cette prime aurait été versée à 4,8 millions de salariés, pour un montant total de près de 2,2 milliards d’euros.
Un levier conséquent que le Gouvernement entend actionner cette année pour booster le recours à l’intéressement, les exonérations étant désormais conditionnées à la mise en œuvre d’un accord d’intéressement par l’entreprise versant la prime.
L’exécutif continue ainsi, dans le prolongement de la Loi PACTE, d’inciter les entreprises à associer les salariés à leur performance, plus particulièrement les TPE/PME.
Rappelons en effet que les TPE et PME ne supportent plus de forfait social sur les primes d’intéressement depuis le 1er janvier 2019. En outre, le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, présenté en Conseil des ministres le 5 février, ouvre aux entreprises de moins de 11 salariés la possibilité de mettre en place un dispositif d’intéressement par voie de simple décision unilatérale.
Décryptage de cette prime Macron « V2 ».
- Des modalités de versement assouplies, proches de la version 2019
La prime bénéficie des exonérations sociales et fiscales dans la limite de 1.000 euros par bénéficiaire, sous réserve :
- que le bénéficiaire soit lié par un contrat de travail à la date de son versement ;
Dans la version 2019, le bénéficiaire devait être lié par un contrat de travail au 31 décembre 2018.
- que la rémunération du bénéficiaire soit inférieure à trois fois le montant du SMIC annuel au cours des douze mois précédant son versement ;
Auparavant, la condition de rémunération s’appréciait sur l’année civile précédente.
- qu’elle soit versée avant le 30 juin 2020 ;
La période de versement est donc significativement élargie, la prime devant l’an passé être versée au plus tard le 31 mars 2019.
- et qu’elle ne se substitue à aucun élément de rémunération.
Son montant peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction de la rémunération, du niveau de classification, de la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou de la durée de travail.
Comme l’an passé, la prime présente un caractère collectif. Il n’est pas possible de moduler son montant selon des critères de performance individuelle.
- Une nouvelle condition d’exonération : la mise en œuvre d’un accord d’intéressement
Désormais, l’exonération est conditionnée à la mise en œuvre effective d’un accord d’intéressement à la date du versement de la prime.
Concrètement, les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord d’intéressement sont invitées à s’en doter d’ici le 30 juin 2020, si elles souhaitent pouvoir bénéficier du dispositif.
A titre exceptionnel, les accords conclus avant cette date pourront avoir une durée inférieure à trois ans sans pouvoir être inférieure à un an.
Pour rappel, un accord d’intéressement peut être mis en place :
- Par convention ou accord collectif de travail de droit commun ;
- Par accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives ;
- Par accord au sein du comité social et économique ;
- Par referendum adopté à la majorité des 2/3 du personnel, d’un projet d’accord proposé par l’employeur.
Les entreprises de moins de 50 salariés ont également la possibilité d’appliquer, s’il existe dans leur secteur d’activité, un accord de branche « clé en main » par simple décision unilatérale.
Nota bene : le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, présenté en Conseil des ministres le 5 février prévoit la faculté pour les entreprises de moins de 11 salariés de mettre en place, par décision unilatérale, un dispositif d’intéressement pour une durée de trois ans à la condition qu’aucun accord d’intéressement n’ait été conclu depuis au moins cinq années avant la date d’effet de cette décision.
- Mise en place : accord ou décision unilatérale
Pour la mise en place du dispositif, l’employeur a le choix entre :
- Un accord collectif conclu selon les mêmes modalités que l’accord d’intéressement (ci-dessus)
- Une décision unilatérale, prise après information du CSE, s’il existe.
Cette année, la réussite du dispositif se mesurera moins au nombre de bénéficiaire qu’au nombre d’accords d’intéressement conclus sur la période.
Son efficacité, sera mesurée au second semestre. Pour l’heure, prime à l’intéressement !
Grégoire Henry